Novembre... Enfin!

Novembre... Enfin!

mar, 31/10/2023 - 07:21
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Nous y voilà !

Des voix s'élèvent. Comment peut-on accueillir novembre? Comment peut-on aimer novembre?

Ce mois est triste, gris, synonyme d'agonie, même de maladie parfois lorsque nous nous adaptons difficilement aux conditions de ce passage d'une saison à une autre. Oui. Un passage, quelques fois très étroit, d'autres fois plutôt large jusqu'à s'y perdre de vue, un passage au même titre qu'une autre saison, celle du printemps, mais à l'envers... car l'année a deux côtés à sa médaille, peut-être trois, ou quatre.

L'automne et le printemps sont des saisons chargées, à quelques kilos près. On récolte ce qu'on sème. À l'instar de la légèreté avec laquelle on s'est engagé avec détermination dans les projets les plus fous au printemps, l'adage nous aide plus loin à constater la lourdeur de la charge à l'automne, si l'on se soucie encore de la suite. Ce concept peut s'appliquer à une vie entière. C'est donc un engagement, un devoir envers soi-même en quelque sorte; si l'on se donne la peine de lancer un projet, d'engendrer un rêve, encore faut-il pouvoir déployer l'énergie pour en gérer à la fin, le résultat. Or, lorsqu'on a terminé le travail, assuré la suite, tout traité, transformé, verni, rangé, clos, entreposé et qu'on est prêt pour affronter l'hiver avec confiance, ce qui reste le but de toutes ces précautions, que nous reste-t-il à faire, sinon se déposer? Ou... carrément se reposer?

On aime novembre quand il répond à un besoin vital : décrocher. Novembre, c'est rentrer à l'intérieur. Possiblement, à l'intérieur de soi-même. Faire le vide. Voir venir. Apprécier. Goûter le temps qui passe, lentement. Oui, faire l'éloge de la lenteur. Il n'y a rien à envier à personne. Nous sommes les choyés de cette terre comme disait Hubert Reeves et la vie suit paisiblement son cours, en tout cas jusqu'à maintenant. Sauf que cette paix, si c'en est une, d'autres humains nous l'envient peut-être. D'autres comme nous n'ont pas cette chance de vivre en paix. Une paix relative car, faut-il garder à l'esprit qu'en matière de perfection, il y a loin de la coupe aux lèvres. Quand d'autres humains comme nous l'ont perdue depuis longtemps et que d'autres encore la recherchent désespérément afin de mettre fin à la détresse qui les habite en ces temps de guerre, comment, même en novembre, dans le confort de notre foyer pouvons-nous garder la paix de l'esprit?

Force est d'admettre à quel point nous sommes vulnérables, à quel point l'avenir nous échappe, à quel point nos plates habitudes nous aliènent dans la conception vague que nous avons du monde, de la vie facile, des objectifs à court terme, des ambitions matérialistes et j'en passe et des meilleures... Cette complaisance est désolante.

Aussi faut-il tenter de faire de novembre ce mois hors du temps, trouver un sommeil régénérateur, comme si le fait de glisser entre deux draps de flanelle se substituait, la nuit venue, au retour inconscient dans le chaud utérus de la mère, dans une analogie rassurante afin de nous apaiser. Aussi faut-il, à l'inverse, continuer à renouer avec le vivant que nous sommes en ces jours sombres, même en opposition à mai. Si loin que nous sommes des grands centres, la chance nous appartient de vivre près de la nature pour rejoindre enfin les rares silences qu'elle peut encore nous offrir. Ces moments d'allégresse inespérée pourraient réussir à nous apaiser dans notre humanité, malgré la désespérance que nous inspire le vaste monde.