Pauvre Rutebeuf

Pauvre Rutebeuf

mer, 16/12/2020 - 06:46
Posted in:
1 comment

Du fin fond des âges nous parvient ce poème de Rutebeuf (13e siècle). Il est encore étrangement d'actualité car l'expérience humaine est à la fois unique et universelle. Seul celui qui consent à plonger au tréfonds de son être peut en mesurer la valeur, s'il accepte  de voir clair en lui-même à travers les déroutes et les errances où l'ont conduit ses doutes. Ainsi, le jour où il accède à la vraie connaissance de soi, il est enfin libre.

Que sont mes amis devenus

Que j'avais de si près tenus

Et tant aimés

Ils ont été trop clairsemés

Je crois le vent les a ôtés

L'amour est morte

Ce sont amis que vent emporte

Et il ventait devant ma porte

Les emporta

 

Avec le temps qu'arbre défeuille

Quand il ne reste en branche feuille

Qui n'aille à terre

Avec pauvreté qui m'atterre

Qui de partout me fait la guerre

Au temps d'hiver

Ne convient pas que vous raconte

Comment je me suis mis à honte

En quelle manière

 

Que sont mes amis devenus

Que j'avais de si près tenus

Et tant aimés

Ils ont été trop clairsemés

Je crois le vent les a ôtés

L'amour est morte

Le mal ne sait pas seul venir

Tout ce qui m'était à venir

M'est avenu

 

Pauvres sens et pauvre mémoire

M'a Dieu donné le roi de gloire

Et pauvres rentes

Et droit au cul quand bise vente

Le vent me vient, le vent m'évente

L'amour est morte

Ce sont amis que vent emporte

Et il ventait devant ma porte

Les emporta

L'espérance de lendemain

Ce sont mes fêtes