L’Abitibi, onzième province?

L’Abitibi, onzième province?

lun, 04/03/2019 - 08:07
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En 1966, pendant qu’à Montréal on inaugure le nouveau métro et qu’on dépense sans compter pour accueillir le monde à l’Exposition universelle de 1967, un mouvement de sécession prend forme en Abitibi. On ne veut rien de moins, avec le nord-est ontarien, que de créer une 11e province.

L’Abitibi se faisant pomper ses ressources au profit du Sud et n’ayant pratiquement aucun service, un groupe d’hommes d’affaires abitibiens avaient fondé ce mouvement.

«Si on ne peut pas se développer comme on le souhaite, alors, autant se séparer et se gouverner nous-mêmes», clamait à l’époque le valdorien Wilfrid Sabourin, initiateur du mouvement.

Pour l’heure, l’Abitibi économique, sociale et culturelle de 2019 ne ressemble en rien à celle de 1966. Pour une bonne part, nous avons rejoint l’ensemble du Québec. Seule la distance nous rend parfois inaccessibles des services spécialisés qui sont à des centaines de kilomètres. Néanmoins reconnaissons d’emblée qu’on n’a pas toujours tort de se sentir ignorés, voire marginalisés de la part des grands centres. Non seulement nous sommes quasi absent des bulletins de nouvelles  nationaux, mais même les rapports météo nous oublient, comme si nous ne faisions pas partie de la même province que Montréal et Québec.

En preuve la récente «bombe météorologique»  ou «cocktail météo» qui frappa vers la mi-janvier : «L’ensemble de la province sera touché», répétaient inlassablement les annonciateurs de catastrophes aux bulletins météo. Alors que tous les modèles prévoyaient que le fameux système éviterait de loin l’Abitibi et que nous jouirions d’un soleil radieux, les prophètes météo persistaient à dire que «l’ensemble du Québec sera affecté

J’ai souvenir, il y a quelques années, écoutant Samedi et rien d’autre à Radio-Canada, d’entendre Ève Christian, météorologue en résidence, annoncer ad nauseam la météo des régions du Québec en insistant sur un catastrophique -28 pour Montréal. Pas un mot sur l’Abitibi où le mercure frisait les -42 ce matin-là. Indigné d’être ignorés, je pris une photo de ma station météo et l’envoyai à madame Christian. Eh bien! dans la demi-heure qui suivit, elle se mit à donner le bulletin pour l’Abitibi et, en plus, nous étions les premiers sur le bulletin national. Parfois faut leur rappeler que nous existons….

Quelquefois, quand on semble vouloir s’intéresser à nous, ce n’est pas toujours pour les bonnes raisons.  On l’a bien vu quand les condescendants écolos et bien-pensants du Plateau se sont déplacés à Malartic il y a quelques années pour venir nous dire comment gérer nos ressources. Lors d’une réunion publique, ils se sont fait poliment rabrouer par les locaux et sont retournés chez-eux. Les fiers descendants de M. Sabourin n’ont pas besoin d’être infantilisés et sont bien capables de décider eux-mêmes de leur avenir.

Je pourrais citer plusieurs autres exemples, notamment dans les bulletins de nouvelles, où nous sommes négligés, voire oubliés. Néanmoins, notre résilience et notre détermination ont fait en sorte que nous sommes devenus une région économiquement forte avec, en 2018, le plus bas taux de chômage au Québec, entrainant du coup plein emploi et pénurie de main d’œuvre. Et tout ça sans faire de bruit!

Wilfrid Sabourin et son groupe d’hommes d’affaires, prônant la sécession en 1966, auraient-ils à ce point fouetté la fierté des Abitibiens pour qu’ils mettent l’épaule à la roue? Serions-nous malgré nous devenus la «11e province»?