La Covid-19: qu’en restera-t-il?

La Covid-19: qu’en restera-t-il?

jeu, 09/04/2020 - 16:57
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Quand cette tempête sera derrière nous, que la poussière sera retombée, il y aura eu l’avant, puis il y aura l’après. Qu’en sera-t-il de cet après? On peut imaginer que plus rien ne sera pareil comme avant.

Déjà on peut sentir chez-nous des changements dans les comportements humains. D’abord il y a cette formidable solidarité face à la lutte au virus. Autant on vivait un individualisme aveugle, un «je m’en foute», autant on voit poindre maintenant un admirable élan solidaire devant la menace pandémique. Et paradoxalement,  l’isolement obligé et « la distanciation sociale », favorisent les rapprochements… Sur les réseaux sociaux, de plus en plus de gens s’interpellent, se parlent, discutent. Et, outil de communication presque disparu, le téléphone reprend du service. Qu’en restera-t-il?

Pour l’heure, tout ces gens confinés chez-eux, individus, conjoints, familles, doivent réinventer leurs relations. Les personnes seules qui sortaient pour leur café quotidien se tournent les pouces à la maison. Que chacun en appelle un autre, suggère notre premier ministre. Les conjoints, travaillant avant chacun de leur côté et étant maintenant en télétravail à la maison, doivent se côtoyer 24 sur 24. Les parents, cloîtrés à la maison avec la marmaille, doivent réapprendre leur rôle éducatif qu’ils avaient « délégué » aux garderies ou au milieu scolaire. Qu’en restera-t-il?  

Jamais je n’aurais pensé que les valeurs de ma génération (j’ai 73 ans) resurgiraient un jour. Et voilà que le confinement  provoque ce retour aux sources fondamentales des valeurs humaines, de constater l’importance du rôle et de la place de chacun dans la société, de retrouver la cellule familiale. Nous en avons pour preuve tout ce qui défile sur les réseaux sociaux en ce moment. Des parents qui redécouvrent le plaisir de planifier une journée avec leurs enfants : préparer le repas, une période académique, une marche, des jeux, etc. D’autres qui arborent fièrement les beaux pains dorés qu’ils ont cuits pour la première fois. Qu’en restera-t-il?

Devant ce minuscule virus qui menace l’Humanité entière, on se sent encore plus petit, très vulnérable, on plie l’échine. Néanmoins, on ne s’avoue pas vaincu pour autant. On l’affronte avec la ferme volonté de s’en sortir un jour. Face à cette pandémie, on constate notre petitesse, notre fragilité dans tout ce qui vit sur cette planète. On se prend à imaginer combien, si nous continuons sur notre lancée aveugle, nous pourrions, à terme, frapper violemment un mur.

Et les risques sont bien réels. Peut-on imaginer, sans tomber dans des scénarios catastrophiques,  une possible pénurie alimentaire dans l’après Covid-19? La production des aliments et des biens essentiels étant mondialisée, comment réagirions-nous à un ralentissement de l’approvisionnement? Ça mérite réflexion. Est-ce que des fraises au cœur blanc produites en Floride nous sont nécessaires en hiver? Et les asperges du Pérou avec leur empreinte carbone (elles voyagent en avion)? Les tomates de serre du Mexique, insipides, nous sont-elles indispensables pendant la saison hivernale?

Peut-être devrions-nous revenir à une production et un approvisionnement local adaptés à nos besoins saisonniers. Ça suppose de petites productions  moins réglementées, diversifiées, délocalisées. Les gens de ma génération ont connu ça et n’en sont pas morts, au contraire. Je suis un survivant de cette alimentation au gré des saisons, en bonne santé, avec un système immunitaire blindé.  On cultivait et entreposait patates, carottes, choux, navets, etc. On mettait l’été en conserve. Dès les premiers gels, on sacrifiait un cochon et on le suspendait sous l’appentis. Certes, vous rétorquerez qu’on ne peut pas importer la campagne dans nos villes, nos mégapoles. Mais peut-être pourrait-on profiter de cette crise pour repenser les modèles urbains où sont concentré des millions d’individus?

Il se pointe en ce moment une introspection collective. On lève un peu le pied, on a moins l’écume à la bouche devant les contraintes qui nous sont temporairement imposées. À terme, quand nous aurons décanté cette grande épreuve, souhaitons qu’il en restera quelque chose, que l’Humanité en retirera humblement des leçons, notamment notre petitesse sur cette planète mais en même temps notre immense désir de survie. Qu’en restera-t-il?