Descente au cœur du mâle

Descente au cœur du mâle

mer, 25/09/2019 - 20:16
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«Nul n’est plus arrogant à l’égard des femmes, agressif et dédaigneux, qu’un homme inquiet de sa Virilité.» Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe

Tout être humain, homme ou femme, a le droit de s’exprimer sur le mouvement #MeToo. Au Téléjournal de fin de soirée du 16 septembre dernier, on a relaté le fait que depuis le début de la présente année en France, plus de cent femmes ont été assassinées par leur conjoint. Comme si ces derniers avaient droit de vie ou de mort sur leur épouse. «Elle le quitte, il la tue.»

 

Dans son livre Descente au coeur du mâle, Raphaël Liogier met en lumière la promesse non tenue de la modernité. Celle qui voulait qu’avec l’indépendance économique des femmes, l’égalité entre les sexes serait chose faite. L’auteur retourne aux origines de l’Humanité pour essayer de comprendre d’où vient la résistance des hommes à reconnaître les femmes comme leurs égales.

 

Heureusement, tous les hommes ne tiennent pas la femme pour un objet jetable après usage.  Mais le concept de la femme objet a pourtant fait son chemin en s’inscrivant dans les mœurs depuis des décennies, voire des siècles. #MeToo n’est pas un événement ordinaire comme une simple nouvelle ou une mode passagère de fille. Non. «C’est l’amorce d’une des plus justes, fines, incisives et radicales critiques collectives de la situation existentielle des femmes qui remet en question les fondements les plus archaïques et archétypaux de l’humanité.»(1)

Encore faut-il que ce mouvement social concerne toutes les couches de la société et que toutes, simples ouvrières, femmes anonymes, puissent s’y reconnaître, malgré le faible écho dont leurs dénonciations ont pu bénéficier. Elles dénoncent l’insistance des hommes qui persistent à prendre les non pour des oui. Elles veulent l’égalité réelle, celle qui reconnaît concrètement les femmes comme individus doués de volonté autonome. Le sens de cette dénonciation ne doit pas être discrédité ni banalisé, encore moins perçu comme une vengeance, tout au plus comme une révolte légitime; car l’enjeu dépasse les torts qui pourraient être causés aux hommes dénoncés pour leur attitude parce que tant que la preuve n’est pas faite de leur culpabilité, ils sont présumés innocents. Et, ironiquement, le fardeau de la preuve appartient aux femmes.

La liberté est un droit inaliénable pour tous. Il faut seulement comprendre que l’une se termine là où celle de l’autre commence, c’est-à-dire que nul ne peut assujettir l’autre sans son consentement. Le philosophe Emmanuel Kant a parlé de la «reconnaissance de la capacité à se servir de son propre entendement sans être dirigé par un autre.» Cette controverse sur le consentement des femmes a mis en lumière la sempiternelle substitution de la volonté de l’homme sur celle moins affirmée de la femme et son refus d’une attitude machiste qui s’inscrit dans la structure de domination homme-femme.

Le mouvement #MeToo dénonce plus qu’un inconfort. Cet enjeu humaniste est de taille. Il s‘agit  de faire en sorte d’intégrer dans les moeurs de nos sociétés dites modernes le fait que les comportements inadéquats et contraignants pour l’autre ne sont définitivement plus acceptables aujourd’hui et à jamais.

À la fin de son livre, l’auteur parle d’un contrat intime et social, d’un nouveau type de solidarité entre les genres, d’une nouvelle forme de confiance, sans aucune discrimination.

(1) Descente au cœur du mâle, Raphaël Liogier, 138 p., p. 29.