Le péril jaune 2

Le péril jaune 2

ven, 29/03/2019 - 08:26
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Mon confrère Jean-Pierre Robichaud, journaliste au Journal Le Pont, a déjà utilisé ce titre, Le péril jaune, comme figure de style pour parler des autobus scolaires. Cela n’avait aucun lien avec cette expression employée par les démographes qui, devant l’augmentation fulgurante de la population chinoise, prédisaient l’envahissement de la planète par les Chinois.

Faut-il en conclure qu’ils avaient un peu raison? Si l’on tient compte du « Made in China » bien lisible sur tous les produits que l’on achète, il faut accepter que sur le plan économique ces derniers ont en effet conquis la planète. Doit-on paniquer et lancer des alertes comme si nous allions mourir étouffés prétextant qu’ils nous tiennent à la gorge?

C’est ce qu’on a lu, vu et entendu dans les médias, sur Facebook et même dans l’enceinte de notre Assemblée nationale. Le sujet de cette dernière alarme portait sur l’achat des terres en Abitibi et au Témiscamingue par des Chinois. Madame la députée de Rouyn-Noranda a fait une sortie remarquée, dans cette noble Chambre, en parlant de ces vautours qui se jetaient sur nos pauvres terres abitibiennes, proies faciles pour ces «prédateurs». À l’antenne de RNC Média, au bulletin de nouvelles de 18 heures, à «La question du jour», on demandait à la population si elle voyait un danger dans cette pratique? Quatre-vingts pour cent y ont répondu affirmativement.

Sur le même sujet, un nombre élevé d’internautes se scandalisaient de voir débarquer ces «voleurs acheteurs de terres». Est-ce une manifestation xénophobe? Est-ce du racisme? De quoi a-t-on si peur? On court la planète entière pour emmener de la main-d’œuvre en Abitibi; c’est une question de survie pour nos entreprises. L’agriculture se meurt chez nous depuis plusieurs années, la relève n’est pas là... Nous avions de belles terres agricoles prêtes à produire, mais qu’on abandonne, puis c’est le laiteron des champs, les chardons et les ronces qui les envahissent. Les quelques fermes qui sont encore productives risquent de mourir, faute de main-d’œuvre et faute d’acheteurs potentiels pour poursuivre leur développement.

Est-ce qu’on craint que les Chinois s’emparent de nos terres pour les déménager en Asie ou ailleurs? Si des gens achètent des espaces chez nous, ce n’est certainement pas pour les laisser à l’abandon. Pour les cultiver, on aura besoin de main-d’œuvre, on aura besoin de machines, on aura besoin de services… Ces nouveaux propriétaires devront donc utiliser les ressources du milieu et, s’ils réussissent à obtenir de la main-d’œuvre parmi leurs concitoyens, venant de leur pays, pour les établir dans nos rangs qui se dépeuplent sans cesse, n’est-ce pas souhaitable? Le fly-in/fly-out ça va pour les mines du Nord, mais ce n’est pas pertinent pour l’agriculture. On n’emmènera pas, par avion, des travailleurs agricoles en leur offrant deux semaines d’ouvrage à Palmarolle et deux semaines de vacances à Pékin. Ils devront donc habiter ici.

Si l’on regarde, au Canada, l’immigration chinoise a produit de bons résultats depuis deux cents ans. Généralement ces gens sont des travailleurs méthodiques, acharnés, ce sont leurs enfants qui obtiennent les meilleures notes dans nos universités. D’où vient donc cette crainte, cette peur viscérale de voir des terres achetées par ces gens?

Je connais des cultivateurs prospères qui, malgré leurs multiples démarches, n’ont jamais été capables de trouver des acheteurs ici, dans notre région, pour des terres de qualité. Pourquoi alors pousser de grands cris parce que des personnes intéressées veulent s’en porter acquéreurs pour produire de la nourriture dont leur pays a un grand et urgent besoin? Déjà, au Canada, nos productions de canola, de porcs, de poissons se vendent en majeure partie en Chine, pourquoi ne pourrions-nous pas permettre à ces gens de venir le produire chez nous, dans ce Nord que nos pères ont défriché et qui pourrait encore produire? Rendons leur donc hommage et reconnaissance afin d’honorer leur labeur et les sueurs versées sur ce territoire, en permettant à d’autres de donner suite à leurs ambitions. Moi, Le Vieux Grincheux, je grinche aujourd’hui contre tous ces peureux qui grinchent pour rien...