Fermer le jardin

Fermer le jardin

mer, 30/09/2020 - 06:47
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De l'avis de tous, l'automne arrive toujours trop tôt. Il nous prévient néanmoins de son arrivée et les signes qu'il nous envoie ont l'avantage d'être clairs : baisse de température, diminution des heures d'ensoleillement, lumière oblique caractéristique de l'équinoxe d'automne.

Tout le règne végétal réagit et nous de même. La saison de transition nous prépare à l'adaptation aux conditions de celle qui suivra sous peu : l'hiver… qui n'est pas réputée pour sa clémence. Voilà pourquoi il nous faut profiter de l'air frais et vivifiant d'octobre pour être au jardin et vivre l'Action de grâce comme la vie à la campagne nous le propose. La terre généreuse nous invite à la récolte des fruits du labeur…

Fermer le jardin, c'est le quitter en lui disant merci. Merci pour l'abondance de fruits et de légumes dont il nous a déjà gratifiés pendant la belle saison et maintenant, lorsque tout est arrivé à maturité. Idéalement, nous devons laisser en terre les légumes racines jusqu'à la limite acceptable, de telle sorte que le moment venu de les récolter, ils ne soient pas altérés par la chaleur ambiante, parce qu'arrivés à l'état de dormance et qu'ils le resteront jusqu'au printemps et davantage dans un caveau prévu à cet effet. On peut aussi faire l'expérience de laisser une partie de la récolte au jardin en prenant soin de la protéger du froid avec six à dix centimètres de paille. À la fin d'avril, quel plaisir de déterrer une belle quantité de carottes croquantes et sucrées, meilleures encore qu'elles ne pouvaient l'être à l'automne! Certains gardaient même autrefois leurs choux cordés le long du solage à l'extérieur de leur maison, avec, pour seuls abris, une toile épaisse et la neige entassée là à la pelle. On allait puiser au besoin dans la réserve jusqu'à épuisement des stocks. D'autres les entassaient dans un baril à l'étable. Lorsqu'ils se servaient, ils prenaient soin de déshabiller le chou de ses feuilles de protection pour les donner aux animaux qui raffolaient de ces gâteries ponctuelles.

Fermer le jardin, c'est également voir à déraciner les plantes qui ont porté fruit ou couper au raz du sol les tiges aériennes qui ont puisé dans la lumière solaire tout l'été par la photosynthèse, la chlorophylle utile à la reconstruction des réserves nécessaires à la prochaine production (asperges). Toutes les verdures, fines herbes, oseille, livèche, menthe, etc. seront glanées et transformées (tisanes, herbes salées, pestos, kalé séché, etc.) Laitues et chicorées devenues amères, fanes de carottes, de rutabaga, de betteraves, ces dernières comestibles, de la famille des polygonacées comme le sarrasin et les épinards, pourraient remplir les mangeoires des animaux de la ferme. Ces vestiges, riches en carbone, pourraient aussi aller au compost, mais d'autres jardiniers seront enclins à les laisser sur place. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.

Fermer le jardin, c'est célébrer la vie faite de cycles et d'éternelles transformations saisonnières. En terme de travaux, c'est la réponse automnale pleine de gratitude et proportionnelle à toute l'énergie déployée au printemps en semences d'espoir. C'est la vie qui tient toujours ses promesses, pour peu qu'on veuille s'investir.