La génération de l'immédiateté

La génération de l'immédiateté

sam, 02/07/2022 - 07:41
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J’ai acquis ma première auto (usagée) à 22 ans, et ma propriété à 30 ans. Marié et père de deux jeunes enfants au début des années ‘70, je préférais attendre d’avoir les moyens financiers afin de ne pas trop m’endetter. Aujourd’hui, les jeunes veulent tout, tout de suite.

Et ça commence tôt. Qui n’a pas un téléphone intelligent ou une tablette avant l’âge dix ans? Qui ne possède pas une auto au Cégep, parfois même au secondaire? Les stationnements des universités n’ont jamais été aussi vastes.

 « Quand les jeunes veulent de l’argent et des biens, ils le veulent tout de suite. C’est une génération de l’immédiateté. »

Suzanne Laberge, professeure au département de kinésiologie de l’Université de Montréal

« Très tôt, ils ont le cours de musique, le cours de ci, le cours de ça, les activités sportives… Rendus au cégep, c’est le travail, car ils ont besoin d’argent pour payer le téléphone, les sorties, l’auto. Ils ont besoin de beaucoup plus d’argent qu’il y a 30 ans », fait remarquer la sociologue.

Un grand sportif ne devient pas rapidement un champion

La technologie pousse toujours plus loin l’instantanéité et annihile la patience et la pugnacité pour arriver à s’épanouir et à atteindre ses objectifs sur du plus long terme. Les teenagers et les vingtenaires sont pressés d’acquérir des biens et des gadgets que ma génération n’espérait pas avant trente ans. Dès l’arrivée sur le marché du travail, le couple acquiert puis doit financer résidence, meubles, électroménagers, autos et autres biens « essentiels » à son bien-être et à son bonheur. Voila pourquoi, fin 2021, chaque ménage canadien était endetté en moyenne à 186.2%. C’est dire qu’ils doivent 1.86$ pour chaque dollar net d’impôt gagné annuellement.

Certes il est fortement conseillé d’acquitter le solde de sa carte de crédit à chaque mois; sinon c’est la spirale du surendettement. Or, par manque de liquidité, peu le font. Il est ahurissant de constater que plusieurs consommateurs ont un solde sur leur carte qui atteint parfois la moitié de leur salaire annuel. C’est à n’en pas dormir…

Les conséquences

Ce haut niveau d’endettement rend les jeunes ménages très vulnérables financièrement. Ils sont coincés, condamnés à ne pas manquer une seule journée de travail, à ne même pas être malade. Ils sont à la merci des taux d’intérêt dont la tendance est à la hausse en ce moment. Un demi-point peut mettre la résidence en péril. Et comme si ce n’était pas assez, le prix de l’essence explose et l’inflation pourrait passer du trot au galop.

Tout cela crée une pression énorme sur la relation du couple. Il est convenu que les conflits entre conjoints s’amorcent souvent à cause de problèmes financiers. Et quand survient la séparation, le partage des biens et des dettes (et de la garde des enfants) mène parfois à des scènes acrimonieuses.

Ensuite il faut repartir à zéro. Ce sentiment d’échec, devant lequel plusieurs ne sont pas préparés, mène souvent à la dépression. Et il est profondément triste de constater que pour certains, la solution est le suicide.